Taïwan: le candidat décrié par la Chine, Lai Ching-te, remporte l'élection présidentielle

Lai Ching-te, le candidat à l'élection présidentielle de Taïwan présenté par la Chine comme un « grave danger », a, selon des résultats officiels quasi définitifs, remporté le scrutin ; Hou Yu-ih, le candidat favorable à un rapprochement avec Pékin ayant concédé sa défaite. Dans un communiqué, l'Union européenne « félicite tous les électeurs » ayant participé à « cet exercice démocratique ».

 

Le candidat du principal parti d'opposition à Taïwan, le Kuomintang (KMT), qui est favorable à un rapprochement avec la Chine, a concédé, samedi 13 janvier au soir, sa défaite à l'élection présidentielle. « Je respecte la décision finale du peuple taïwanais » et « je félicite Lai Ching-te et Hsiao Bi-khim (sa colistière, NDLR) pour leur élection, en espérant qu'ils ne décevront pas les attentes du peuple taïwanais », a déclaré Hou Yuh-ih face à ses partisans. Au cours de son premier discours, le président élu Lai Ching-te a salué « un nouveau chapitre dans notre démocratie ».

40,2% des voix

Le vice-président sortant Lai Ching-te, du Parti démocrate progressiste (DPP), était crédité, samedi soir, de 40,2% des voix, selon des résultats officiels quasi définitifs. Son principal opposant Hou Yu-ih, 66 ans, candidat du Kuomintang (KMT) qui prône un rapprochement avec Pékin, a obtenu 33,4% des votes. Le troisième candidat, Ko Wen-je, 64 ans, du petit Parti populaire taïwanais (TPP) et qui se présente comme anti-establishment, arrive en troisième position avec 26,4%.

Les Taïwanais votaient aussi pour renouveler les 113 sièges du Parlement. Le Parti démocrate progressiste (DPP), écrit notre correspondant à Taïwan, Adrien Simorre, y perd en revanche sa majorité absolue. Il sera donc obligé de composer avec le troisième parti, le Parti populaire de l'ancien maire de Taipei, Ko Wen-je. Ce parti a créé la surprise en faisant campagne sur des questions domestiques, comme le prix du logement, les bas salaires, les affaires de corruption, autant de questions qui inquiètent la jeune génération. Sa position sur le rapport à la Chine reste ambigu.

Sujet explosif

Hou Yu-ih, lui, a dit espérer que « quelles que soient les turbulences qui ont marqué le processus électoral, tout le monde s'unira après le scrutin pour faire face à l'avenir de Taïwan ». Toute la semaine, Pékin a accentué sa pression diplomatique et militaire. Jeudi, cinq ballons chinois ont franchi la ligne médiane séparant l'île autonome de la Chine, selon le ministère taïwanais de la Défense, qui a aussi repéré dix avions et six navires de guerre. Samedi, des journalistes de l'AFP ont observé un avion de chasse chinois au-dessus de la ville de Pingtan, la plus proche de Taïwan. Et sur le réseau social chinois Weibo, le hashtag « Élection à Taïwan » a été bloqué dans la matinée.

Le statut de Taïwan est l'un des sujets les plus explosifs de la rivalité entre la Chine et les États-Unis, premier soutien militaire du territoire, et Washington a prévu d'envoyer une « délégation informelle » sur l'île après le vote. Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a félicité Lai Ching-te ainsi que les Taïwanais pour leur « solide système démocratique ».

Suite à l'annonce de la victoire du candidat Lai Ching-te, la Chine a affirmé que ce vote « n'entravera pas la tendance inévitable d'une réunification [de Taïwan] avec la Chine ». « Nous nous [...] opposerons fermement aux activités séparatistes visant à l'indépendance de Taïwan ainsi qu'à l'ingérence étrangère », a ajouté Chen Binhua, un porte-parole du bureau chinois responsable des relations avec Taïwan, cité par l'agence officielle Chine nouvelle.

Un conflit dans le détroit de Taïwan pourrait être désastreux pour l'économie mondiale : l'île fournit 70% des semi-conducteurs de la planète et plus de 50% des conteneurs transportés dans le monde transitent par le détroit.

Lai Ching-te, des origines modestes

Vice-président depuis quatre ans auprès de Tsai Ing-wen, ce fils de mineur, âgé de 64 ans, a étudié à Harvard aux États-Unis et a d'abord été médecin à l'hôpital de Tainan, dans le sud-ouest de l'île. D'origine modeste, à l'inverse de la majorité de la classe politique taïwanaise, il a été élevé par sa mère après le décès de son père quand il était enfant. Décrit comme pugnace et combatif, Lai Ching-te – qui se fait aussi appeler William Lai – se décide à entrer en politique en 1996, quand Pékin effectue des tirs d'essai de missiles autour de Taïwan au moment de la première élection présidentielle démocratique.

« J'ai décidé qu'il était de mon devoir de participer à la démocratie taïwanaise et d'aider à protéger cette expérience naissante de ceux qui lui voulaient du mal », avait-il témoigné l'an passé dans le Wall Street Journal. D'abord député puis maire de Tainan, il devient ensuite Premier ministre en 2017, pour le Parti démocrate progressiste (DPP). Pékin l'a qualifié lui et sa colistière Hsiao Bi-khim, ancienne représentante de Taipei à Washington, de « dangereux duo pro-indépendance ».

(Avec AFP)


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