Birmanie: 5e jour de manifestations, raid contre le siège du parti d'Aung San Suu Kyi

Les Birmans ont commencé ce mercredi 10 février à descendre dans la rue pour le cinquième jour consécutif. Mardi, l'armée a mené un raid nocturne contre le siège de la Ligue nationale pour la Démocratie (LND), le parti d'Aung San Suu Kyi. Une action qui montre la détermination des généraux putschistes face aux appels à rétablir la démocratie.

 

Tôt ce mercredi matin, plusieurs centaines de personnes ont commencé à se rassembler dans le centre de Rangoun, la capitale économique du pays, électrisés, alors que la répression a franchi un nouveau cap mardi.

Selon la LND, les militaires ont mené mardi soir un raid contre les locaux de la formation à Rangoun. « Le dictateur militaire a investi et détruit le quartier général de la LND aux environs de 21h30 » (15h TU), a indiqué le parti sur sa page Facebook, alors qu'avaient lieu des manifestations dans plusieurs villes, réprimées avec des canons à eau et des tirs de balles en caoutchouc.

L'ONU a condamné mardi l'usage « disproportionné » et « inacceptable » de la force par l'armée, auteure la semaine dernière d'un coup d'État. « De nombreux protestataires ont été blessés, dont certains gravement », d'après des rapports reçus de plusieurs villes du pays, a déclaré Ola Almgren, coordonnateur résident des Nations unies en Birmanie.

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell a évoqué l'adoption de nouvelles sanctions contre l'armée birmane: « Nous sommes en train de revoir toutes nos options », a-t-il déclaré devant les eurodéputés, soulignant toutefois que ces mesures ciblées ne devaient pas frapper la population.

 

Un régime militaire « différent » des précédents

Pour l’heure, il est impossible d'obtenir une estimation du nombre de blessés auprès des hôpitaux. Une femme aurait été touchée par balle à la tête et demeurerait dans un état critique à l’hôpital. 

Plus tôt ce mardi, la télévision d'État a déclaré que les forces de police avaient agi en toute légalité en ayant recours aux canons à eau, tirs de balles en caoutchouc ou encore de gaz lacrymogènes lors de heurts avec les manifestants

On peut voir circuler sur Twitter des vidéos montrant des officiers de police laissant passer les manifestants de l'autre côté des barricades, mais aussi rejoignant les protestataires. 

Ces centaines de milliers de birmans défilent depuis plusieurs jours à travers le pays malgré un risque réel de répression violente. Ils réclament la libération des personnes détenues, dont Aung San Suu Kyi, mais aussi la fin de la Constitution de 2008, très favorable aux militaires. 

Le commandant en chef de l'armée, Min Aung Hlaing, s’est pour la première fois exprimé mardi soir sur la chaîne de l'armée. Il s'est engagé à « la tenue d'élections libres et justes » à la fin de l'état d'urgence d'un an et il a promis un régime militaire « différent » des précédents.

Importance de la couverture médiatique

« C'est un moment qui peut durer, souligne Fédéric Débomy, spécialiste de la Birmanie, co-auteur de la BD Aung San Suu Kyi, Rohingya et extrémistes bouddhistes, invité sur l'antenne de RFI. On peut se souvenir de 1988 et de 2007. 1988, cela avait duré mais cela s'était terminé par une répression sanglante, par un bain de sang et c'est évidemment ce qu'on craint. En 2007, cela s'était terminé par une répression brutale mais pas un bain de sang. La nuance tient, à mon avis, au moins en partie au fait qu'en 2007, les images sortaient, les vidéos sortaient, c'était extrêmement couvert. C'est encore le cas aujourd'hui et donc c'est extrêmement important que les images continuent à circuler et que l'attention soit maintenue. Cela ne protège pas entièrement les manifestants, mais cela les protège dans une certaine mesure. »


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