Royaume-Uni: le sexisme à Westminster mis en lumière par un article de tabloïd misogyne

La numéro deux de l’opposition travailliste est accusée de « distraire » Boris Johnson, assis en face d’elle, pendant les débats parlementaires en croisant et décroisant les jambes. Le tabloïd Mail on Sunday reprend dans un article publié dimanche les déclarations d’un député conservateur non cité. Depuis dimanche, c’est une tempête politique. Le rédacteur en chef du Mail on Sunday a été convoqué par le président de la Chambre des communes.

 

« No, Mr. Speaker » a répondu Matt Dillon, le rédacteur en chef du Mail on Sunday, en Une de son tabloïd, à la démarche très rare du président de la Chambre des communes. Matt Dillon et l’auteur de l'article, Glen Owen, avaient d’abord accepté de venir discuter avec Sir Lindsay Hoyle pour revenir sur la polémique. Mais ils ont ensuite estimé qu’avec ses différentes prises de parole, le président des Communes avait déjà formé son jugement. C’est vrai que Lindsay s’exprime depuis dimanche pour dénoncer la publication de l’article sur Boris Johnson. Ils ont finalement « respectueusement » décliné l’invitation, au nom de la liberté de la presse.

Cela a fait partie du débat qui a agité le Royaume-Uni. Est-ce que le journaliste est responsable de rapporter des propos qui lui ont été tenus ? Est-ce que le Parlement a son mot à dire sur les choix éditoriaux, par exemple les photos, d’un journal, quand même de mauvais goût ? Le Mail, habitué des potins potaches et des photos de femmes dénudées, a tout de même rappelé qu’il condamnait le sexisme et la misogynie.

Libération de la parole des femmes politiques

Cette « histoire » a permis de mettre en lumière le sexisme à Westminster. Depuis la parution de l’article, plusieurs élues ont corroboré les propos tenus par le député Tory non identifié. À savoir, qu’une députée utiliserait son corps pour distraire ses opposants politiques et pour compenser son manque d’éloquence.

Beaucoup de femmes politiques ont également pris la parole dans les médias pour expliquer que, elles aussi, choisissaient leurs tenues en fonction de ce que pourraient en dire leurs confrères : pas de jupes trop courtes, pas de chemisiers trop légers, pas de décolletés trop plongeants. La députée Harriet Harman, qui est l’élue UE ayant siégé en continu depuis le plus longtemps, juge d’ailleurs que la situation pour les femmes au Parlement a empiré depuis son élection en 1982… Elles ne représentent d’ailleurs qu’un tiers des élues à la Chambre basse – un tout petit peu au-dessus de la moyenne de l’OCDE et dans la lignée des pays de l’Union européenne.

70 plaintes depuis 2018

Oui, le Parlement britannique a même eu son propre mouvement, « Pestminster ». C’était en 2018, depuis, une commission de surveillance et de plaintes a été mise en place. Et ça va au-delà d’une ambiance potache. La Commission a reçu déjà 70 plaintes, qui visent 56 députés… dont trois membres du gouvernement et deux porte-paroles de l’opposition. Des plaintes pour harcèlement sexuel et comportement inapproprié, des plaintes de la part d’élu.e.s et d’assistants parlementaires.

Le président de la Chambre, Lindsay Hoyle, s’est dit affolé par le nombre de députés visés et promet de lancer une enquête sur les conditions de travail au sein du Parlement.


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