Élections en Russie: un scrutin sous surveillance et en quête de crédibilité

Troisième et dernier jour, ce dimanche, d’élections législatives mais aussi locales en Russie. Des élections où presque aucun opposant ne peut se présenter et où se pose la question de la sincérité du scrutin. RFI a rencontré à Moscou un membre indépendant d’une commission électorale.

 

On le retrouve devant les grilles du bureau de vote où il est volontaire pour vérifier douze heures par jour le bon déroulement des opérations. À 41 ans, Andreï Tcherviakov est passionné de politique, observateur d’élections dès 1999 quand il est étudiant, candidat aux législatives pour le parti centriste Iabloko, c’était en 2011, « quand nous avions encore des élections justes », dit il, et pourtant, déjà, l'expérience s’était avérée difficile.

« J’ai bien vu ce qui se passait. On est passé de 18% lors du décompte des bulletins dans les bureaux de vote à 4% une fois arrivé au bureau électoral régional. Alors j’ai voulu devenir membre de la commission électorale justement pour que la loi soit appliquée correctement », assure-t-il.

Les résultats qui changent en cours de route, Andreï Tcherviakov l’assure, c’est terminé. En revanche, la nouveauté cette année est dans la surveillance vidéo du scrutin.

« Avant, il y avait des gens qui restaient chez eux toute la durée du scrutin pour tout surveiller en direct et repérer une fraude, note-t-il. Certains avaient même des logiciels précis qui permettaient de compter le nombre de personnes qui s’étaient déplacées dans un bureau de vote et comparer avec les chiffres officiels. Cette fois, pour ces élections, l’accès libre aux vidéos est restreint. »

La commission électorale russe l'assure : si l'accès est désormais accordé sur demande et à l'avance c’est pour éviter toute interférence étrangère dans les élections.

Le vote intelligent entravé

Le vote dit intelligent est désormais presque totalement entravé depuis que Google et Apple ont enlevé sous la pression des autorités l'application du mouvement Navalny. Les proches du militant emprisonné avaient tenté la parade en utilisant notamment le canal de Telegram Messenger, particulièrement populaire en Russie, mais le fondateur russe de Telegram a suivi Google et Apple et a retiré son application. Elle ne publie désormais plus sur ses messageries les recommandations du mouvement de l'opposant.

La consigne des partisans d'Alexeï Navalny la plupart du temps est de voter pour un candidat communiste pour faire barrage à celui du pouvoir. Le parti communiste fait partie de l’opposition dite « systémique », celle qui est contrôlée par le Kremlin.

Andreï Kolesnikov, chercheur au Carnegie Institute, doute fort que ce parti s'émancipe de la tutelle du pouvoir après les élections. « Le Parlement n’est qu’une imitation d’institution. Cela fait des années qu'il est totalement contrôlé par le Kremlin. Alors, oui, les communistes peuvent créer ponctuellement des problèmes pour le pouvoir et montrer leur indépendance mais je ne crois pas que ça ira très loin. Ils peuvent tenter de ressembler à l’opposition, mais seulement dans une certaine limite. Il y a un cadre et des lignes rouges.

Et puis Il y a ce précédent de 2019, rappelle Andreï Kolesnikov, quand le vote intelligent a un peu marché et qu’il y a eu plus d’élus communistes au conseil municipal de Moscou « toutes les décisions ont été prises par le maire qui n’a jamais tenu compte des élus. Comme au plan national c'était la vertical du pouvoir. Cela fonctionne  comme ça à la Douma». Et il insiste : « Je doute fortement que le parti communiste échappe au contrôle du Kremlin. »


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