La Biélorussie affirme avoir évacué les camps de migrants à la frontière polonaise

La Biélorussie dit avoir évacué ce jeudi 18 novembre les principaux camps de migrants à sa frontière avec la Pologne. Ce qui pourrait constituer une étape majeure vers une issue à cette crise impliquant également la Russie et l'ensemble de l'Union européenne.

 

D'après l'agence de presse biélorusse Belta, des migrants qui s'abritaient dans ces camps de fortune érigés dans la forêt ont été emmenés vers un hangar un peu plus éloigné de la frontière.

Un porte-parole des douaniers polonais cité par Reuters a confirmé que ces camps avaient été évacués : « Ces camps sont désormais vides, les migrants ont été le plus probablement emmenés vers le centre de logistique et de transport qui n'est pas loin du poste frontière de Bruzgi. Il n'y avait pas d'autres camps de ce type [...] mais il y a eu des groupes qui apparaissaient à d'autres endroits pour tenter de franchir la frontière. Nous allons voir ce qui se passe dans les prochaines heures. [...] Il y a encore des gens par là, mais ça se vide clairement. »

L'Union européenne accuse la Biélorussie d'avoir acheminé des milliers de migrants en provenance du Moyen-Orient pour créer une situation de crise à la frontière de la Pologne mais aussi de la Lituanie, en représailles aux sanctions imposées après la répression des manifestations de 2020 contre la réélection du président Alexandre Loukachenko. Minsk dément toute instrumentalisation.

L'UE refuse de négocier avec Minsk

L'évacuation de ces camps intervient après une intense activité diplomatique qui a notamment vu la chancelière allemande Angela Merkel s'entretenir à deux reprises, lundi et mercredi, avec Alexandre Loukachenko, qui n'avait eu aucun contact avec le moindre dirigeant occidental depuis sa réélection de 2020.

Selon Natalia Esmont, la porte-parole d’Alexandre Loukachenko, environ 7 000 migrants se trouvent actuellement sur le territoire biélorusse. Son pays, assure-t-elle, va œuvrer au rapatriement de 5 000 migrants, « s'ils le souhaitent ». Quant aux 2 000 autres, Angela Merkel serait, selon la porte-parole, en train de négocier avec l'Union européenne un « corridor humanitaire » vers l’Allemagne.

Mais Berlin a démenti tout accord. Une source gouvernementale allemande a souligné que la crise actuelle était « un problème européen pour lequel l'Allemagne n'agit pas seule ». Au cours de ses deux entretiens téléphoniques avec le dirigeant biélorusse, la chancelière Angela Merkel avait insisté sur une solution humanitaire gérée par des organisations internationales et sur le retour des migrants dans leurs pays d'origine.

Varsovie ne veut pas « légitimer le régime de Loukachenko »

La Pologne comme les Pays baltes ne voient pas d’un bon œil les contacts entre Berlin et Minsk. Varsovie a mis en garde contre tout accord qui pourrait être conclu « derrière son dos ». Pour le Premier ministre, Mateusz Morawiecki « tout entretien direct avec M. Loukachenko lui vient en aide car il légitime son régime ». 

« Il n'est pas question de négocier avec le régime Loukachenko », déclare de son côté le porte-parole de la Commission européenne Eric Mamer, qui se borne à évoquer des entretiens techniques avec les agences des Nations Unies et leurs homologues biélorusses. 

De leur côté, les ministres des Affaires étrangères des pays membres du G7 ont lancé un appel jeudi à la Biélorussie pour qu'elle mette un terme à des « actes inhumains » qui « mettent la vie de personnes en danger ».

« Nous appelons le régime à cesser immédiatement sa campagne agressive et d'exploitation afin d'éviter d'autres morts et souffrances », déclarent-ils dans un communiqué.

Arrestations à la frontière polonaise

Au moins 11 migrants sont morts des deux côtés de la frontière depuis l'été, selon des organisations humanitaires.

Ces dernières semaines, des centaines de migrants ont tenté chaque nuit de passer en Pologne en affrontant les forces polonaises. Signe que la situation reste tendue, les forces de sécurité polonaises ont annoncé l'arrestation d'une centaine de migrants qui avaient tenté de franchir la frontière dans la nuit de mercredi à jeudi.

Une vidéo diffusée par le ministère de la Défense montre des soldats polonais entourant un groupe important de migrants accroupis par terre la nuit dans une forêt, près d'une clôture de fils de fer barbelé. L'incident n'a pas pu être vérifié de manière indépendante, car les journalistes sont interdits de la zone frontalière immédiate du côté polonais.

Lors d'un autre incident, des séquences vidéo diffusées par les gardes-frontières biélorusses montraient un chien garde-frontière lituanien mordant un homme allongé sur le sol dans un sac de couchage. Les gardes-frontières lituaniens ont admis l'incident, affirmant qu'ils tentaient de repousser un groupe de migrants en Biélorussie et que les gardes-frontières n'avaient pas vu le migrant.

Un vol de rapatriement de migrants est arrivé de Minsk à Erbil, au Kurdistan d'Irak

Un appareil irakien parti de Minsk avec à son bord des migrants qui étaient bloqués à la frontière polono-biélorusse a atterri jeudi soir à l'aéroport d'Erbil, au Kurdistan d'Irak, région d'où nombre d'entre eux sont originaires.

Au total, 431 personnes se trouvaient à bord du Boeing 747 de la compagnie nationale Iraqi Airways, selon le porte-parole du gouvernement de la région autonome du Kurdistan irakien, Jotiar Adel. L'immense majorité des passagers est descendue à Erbil de l'appareil qui devait redécoller dans la soirée pour Bagdad.

Parmi les passagers se trouvaient de nombreux enfants et femmes. À leur descente d'avion, certains se cachaient le visage afin de ne pas apparaître sur les images retransmises en direct par les télévisions locales. Beaucoup d'entre eux portaient leurs biens personnels dans des sacs à dos ou des sacs plastique.

Ce rapatriement, le premier depuis le début de la crise migratoire à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne, se fait « sur la base du volontariat », selon le gouvernement de Bagdad.

Les Kurdes d'Irak rentrés jeudi faisaient partie d'un groupe de plusieurs milliers de migrants, originaires principalement du Proche-Orient, qui étaient bloqués depuis des jours le long de la frontière polonaise, dans l'espoir de gagner l'UE. Varsovie, ainsi que les deux autres voisins européens de Biélorussie, la Lituanie et la Lettonie, refusent de les laisser passer.

Bruxelles espère que la pression exercée sur les compagnies aériennes pour qu'elles cessent d'acheminer des migrants à Minsk en provenance du Proche-Orient portera ses fruits. Plusieurs compagnies ont déjà accepté de suspendre leurs vols vers la capitale biélorusse.

 


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