Le report des Jeux olympiques pèsera sur l’économie japonaise

Le Japon est déjà menacé de récession. Celle-ci sera amplifiée par le manque à gagner qu’occasionnera un report des JO, notamment en matière de tourisme et de consommation.

C’est désormais une question de jours, ou de semaines. L’annonce d’un report des Jeux olympiques 2020 ne fait presque plus aucun doute. Le président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, a, pour la première fois, dimanche 22 mars, ouvertement évoqué cette option.

Le premier ministre japonais, Shinzo Abe, a fait de même lundi, rompant lui aussi pour la première fois avec la ligne de conduite officielle de Tokyo, qui, jusqu’alors, était celle d’un maintien de la compétition, prévue au Japon entre le 24 juillet et le 9 août.

 

Reste à savoir quel sera le nouveau calendrier retenu. Trois scénarios de report sont à l’étude : automne 2020, été 2021 ou année 2022. Au-delà des conséquences sur l’ensemble du sport mondial et les calendriers des différentes compétitions, quelle que soit l’option choisie, elle aura un impact économique. Tout particulièrement pour le Japon.

L’économie nipponne n’est déjà pas dans un état de santé reluisant : du fait notamment des premiers impacts de l’épidémie de coronavirus, elle est menacée de récession. La maison de titres Nomura attend ainsi un recul de 0,7 % du produit intérieur brut (PIB) pour l’exercice 2020-2021, qui sera clos fin mars 2021.

Une annulation des JO cette année pourrait porter l’ampleur de la chute de la richesse nationale à 1,5 %, selon Nomura. Ou à -1,4 % selon une étude de SMBC Nikko Securities. A un demi-point près, peu importe, cela représente quelque 65 milliards d’euros en moins.

Plus de 2 milliards d’euros de recettes en moins

L’impact d’une non-tenue des JO cette année se ferait surtout sentir au niveau de la consommation : celle des ménages japonais (qui est déjà en fort recul), mais aussi celle des touristes et des supporteurs que la compétition devrait attirer.

Nomura estime que le pays pourrait être privé de 240 milliards de yens (2,02 milliards d’euros) de dépenses des près de 600 000 spectateurs étrangers attendus pour les JO - chiffre avancé par le ministère nippon du tourisme en 2018.

Le gouvernement tablait sur les Jeux olympiques pour atteindre les 40 millions de touristes étrangers en un an, contre 31,8 millions en 2019, dont un tiers de Chinois. L’épidémie de coronavirus a commencé à priver le Japon de touristes sud-coréens et chinois : en février, le nombre de visiteurs a plongé de 58,3 %.

Le secteur touristique génère 7,4 % du PIB, et représente 4,6 millions d’emplois (6,9 % du total des travailleurs). Les dépenses des seuls touristes étrangers sont évaluées à 0,9 % du PIB, selon le cabinet d’études économiques CEIC.

Outre l’hôtellerie, la restauration ou encore les sites touristiques, l’activité de « minpaku », la location de logements entre particuliers du type AirBnB, devrait également être affectée. L’institut Fuji Keizai Networks estimait en 2019 que le minpaku aurait pu générer 130 milliards de yens (1,1 milliard de dollars) en 2020.

L’avenir du village olympique

Une non-tenue des JO aux dates prévues devrait aussi avoir un impact sur les coûts de l’organisation de l’événement, qui pourraient s’amplifier. Fin 2019, les organisateurs estimaient le coût total à environ 11,4 milliards d’euros, somme répartie entre la ville de Tokyo (5 milliards d’euros), le comité d’organisation japonais (5,08 milliards) et le gouvernement central (1,3 milliard). Les entreprises japonaises ont également investi dans l’événement dans des parrainages, versant un record de 2,9 milliards d’euros.

Le décalage du calendrier des Jeux viendra aussi poser la question de l’avenir du village olympique. Bâti sur un polder dans la baie de Tokyo, celui-ci doit être transformé en zone résidentielle (5 632 appartements, répartis dans 23 bâtiments de 14 à 18 étages). Baptisé Harumi Flag, le site de 13,9 hectares est l’un des plus grands projets de réaménagement de Tokyo, et se trouve dans une zone recherchée.

Le début de la transformation en appartements était prévu pour débuter après les Jeux et s’étaler jusqu’en 2024, les premiers emménagements étant attendus vers le printemps 2023. Les appartements s’arrachent d’ores et déjà, avec des prix variant de 50 millions à 174 millions de yens (421 000 à 900 000 euros), selon la surface (entre 60 et 110 m²). Avec le report, le comité d’organisation sera conduit à geler l’opération. Il n’est donc pas exclu qu’il faille dédommager les futurs propriétaires. Un coût supplémentaire. Le Monde


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